Personnalités du jour | Chantale Jean

Chantale Jean : un peu plus haut, un peu plus loin

Pour souligner les 40 ans de peinture de l’artiste malbéenne Chantale Jean, la Galerie Art et Style, sur la rue Ambroise-Fafard à Baie-St-Paul, propose Verticalité, une exposition majeure d’une vingtaine de ses œuvres, à compter du 12 juin, et ce, jusqu’au 13 juillet. Un événement, qui rendra hommage à celle dont le pinceau est guidé par la passion de la nature.

Parmi la trentaine d’artistes dont les œuvres se retrouvent sur les murs d’Art et Style, il y en a déjà trois de Chantale Jean qui y sont accrochées, dont une pas très loin, d’ailleurs, d’un certain Jean-Paul Riopelle !

La responsable de la galerie, Marie-Andrée Bédard, accueille avec enthousiasme le journaliste de Mon Charlevoix venu zieuter sur place avant de réaliser l’entrevue avec l’artiste elle-même. L’exposition solo qui se prépare est à l’initiative de Mme Jean, « qui voulait marquer ses 40 ans de carrière », précise la galeriste.

L’exposition mettra à l’avant-plan, bien sûr, de nombreux tableaux avec des oies, qui furent pendant de nombreuses années un peu la signature de l’artiste charlevoisienne. Il y aura également des toiles plus récentes où le thème de l’élévation s’exprime depuis cinq ans à travers des représentations notamment de la rivière Montmorency, coulant non loin de sa résidence de Boischatel, qu’elle habite dorénavant après un passage à l’Île d’Orléans.

Une technique particulière

« C’est travaillé, tant au niveau de la texture que de la couleur. Il y a tout un travail de préparation de la surface », explique Mme Bédard. Quand on regarde un tableau comme La convention – les titres ont souvent un petit côté humoristique -, on constate que l’artiste a voulu donner du relief à son sujet, mais pas nécessairement en juxtaposant des couches de peinture.

L’explication de Chantale Jean vient au secours du journaliste ! En fait, son secret, c’est qu’au départ, sa toile n’est pas lisse. Il y a déjà du relief dans celle-ci. « C’est ce relief qui vient s’imposer dans ma peinture; le relief m’inspire », explique l’autodidacte, qui, à ses débuts, utilisait le pastel, avant de le troquer assez rapidement pour l’acrylique.

Puisqu’il est question d’oies, à ceux et celles qui seraient tentés de faire un parallèle avec Jean-Paul Riopelle, c’est tout de même différent. Alors que le célèbre artiste québécois combinait lithographie et peinture pour créer des effets de profondeur et de superposition comme dans Les oies de 1989, Chantale Jean cherche plutôt à capter l’essence des oiseaux à travers une observation minutieuse et une palette de couleurs, riches et chaudes, qui varient d’une toile à l’autre. Au final, cela donne une peinture impressionnante.

À la source de Khalil Gibran

Celui qui a écrit en 1923 Le prophète dont est tiré le poème La peur est, en quelque sorte, à l’origine de la suite du parcours artistique de Chantale Jean. « J’aime les lectures philosophiques comme l’écrivain français Alain ou encore le Québécois Jean Proulx. » Tout naturellement, l’œuvre de l’écrivain libanais s’est imposée à elle, en particulier son poème sur La peur, dans lequel une rivière suit inlassablement son parcours, mais incertaine de son avenir : “On dit qu'avant d'entrer dans la mer, une rivière tremble de peur », écrit Gibran. Pourquoi ? « Parce qu’elle ne recule jamais, répond Chantale Jean. Comme nous. »

En intitulant Verticalité son exposition du mois de juin, la peintre explore cette spiritualité à laquelle la nature la convie. Et convie également ceux et celles qui se laisseront happer par le pinceau de l’artiste.

Par le jeu de la perspective, ses rivières donnent l’impression de couler vers des sommets. L’éternité, peut-être.

Avec 14 expositions solos et 31 expositions collectives, que ce soit au Québec ou ailleurs comme en France ou au Canada, les 40 ans de peinture de Chantale Jean seront soulignés avec éloquence. Le reflet en quelque sorte de sa passion ? Absolument ! Encore toute surprise que son art ait autant meublé sa vie, elle souhaite que le rendez-vous qui commencera le 12 juin, avec notamment le vernissage du 14 juin, soit en quelque sorte « une correspondance avec les gens. C’est important. On travaille pour ça. » Et que la peur vers l’avenir se transforme en espérance comme dans la strophe de Khalil Gibran : « Il ne s'agit pas de disparaître dans l'océan, mais de devenir océan.”