Saviez-vous que! | Aéroport Saint-Aimé-des-Lacs
Saint-Aimé-des-Lacs, Charlevoix
Mer. 30 avril 2025 3 minutes
Par Christian Harvey


Un premier aéroport à Saint-Aimé-des-Lacs
Au début des années 1920, l’aviation apparaît comme un moyen efficace et rapide de transporter du courrier et de relier entre elles les grandes capitales du monde aussi bien que les endroits les plus reculés. À la fin de 1926, le ministre des Postes annonce sa volonté d’instaurer une route postale au Canada afin notamment de contrecarrer une éventuelle compétition d’entreprises américaines sur son territoire.
En 1927, des projets expérimentaux voient le jour au Québec : un hydravion réalise un premier jumelage postal le 12 septembre de Montréal à Rimouski (Pointe-au-Père) là où les grands bateaux transatlantiques peuvent naviguer hors des glaces à l’année; des contrats sont également accordés pour la correspondance postale sur la Côte-Nord.
Pour l’année 1927-1928, le ministre des Postes, Peter J. Veniot, octroie à The Canadian Transcontinental Airways Limited (incorporée le 1er octobre 1927) un contrat pour le service postal d’hiver sur le Côte-Nord. Cette société, dont le siège social est situé à Québec, compte comme membres Louis Couture (président), le directeur Me Robert Cannon (solliciteur général), Me Wilfrid Edge (futur juge de la Cour supérieure) et le Dr Louis Cuisinier. L’itinéraire et la fréquence des vols du service est « Québec- La Malbaie – Sept-îles – Anticosti; de Québec à Sept-îles, deux fois par semaine au cours de l’hiver; de Sept-îles à Anticosti, deux fois par mois, de décembre à mars. »


À une assemblée datée du 5 décembre 1927, cette société a « décidé, sur rapport du Docteur Cuisinier, d’établir sur les bords du lac Nairn (concession Grand Lac ou Lac Nairn) la base des opérations de la compagnie et d’y construire un garage et qu’à cette fin une certaine étendue de telle construction était nécessaire ». Le terrain est acquis, le 29 décembre 1927, d’Ulysse Lavoie, résidant de Sainte-Agnès, aujourd’hui Saint-Aimé-des-Lacs.
Charles Sutton et le Dr Louis Cuisinier effectuent, à bord d’un Fairchild, le premier vol en décembre 1927 vers Sept-îles. À la suite d’une dispute, Sutton quitte l’entreprise. La Canadian Transcontinental fait alors l’achat de deux nouveaux avions Fairchaild 71 et embauche deux pilotes d’expérience : Roméo Vachon (1898-1954) et Clarence Alvin « Duke » Schiller (1900-1943).
Le 25 décembre 1927, le pilote Roméo Vachon quitte la base de Sainte-Agnès avec à son bord 753 livres de courrier. La technique de la livraison de l’époque est assez inusitée :
« Les matières postales étaient jetées du haut des airs, aussi près que possible des bureaux de poste, sur une aire désignée par un mât et un drapeau. Aucun parachute n’était utilisé, comme on l’a prétendu à tort. En approchant du but, le pilote descendait le plus possible; pendant ce temps, le mécanicien ouvrait la trappe qui fermait une ouverture au niveau du plancher de la carlingue et basculait le sac postal. »


Toutefois, la Canadian Airways prend le contrôle, en juin 1929, de la Canadian Transcontinental et déplace progressivement les opérations de Saint-Aimé-des-Lacs à Rimouski. Dès lors, ce premier aéroport est beaucoup moins utilisé par cette entreprise qui s’en départit finalement le 15 février 1946.
Une nouvelle compagnie décide alors d’implanter une base au lac Nairne. Le 6 août 1947, l’ancien édifice est vendu à l’Atlas Aviation Limited, une compagnie dont le siège social se trouve à Ottawa. En 1949, cette entreprise envisage même de faire construire une première piste d’atterrissage dans Charlevoix, dans le secteur dit des « Dunes » situé entre Clermont et La Malbaie. Le pilote Rodolphe Pagé, qui demeurait au deuxième étage de l’Hôtel aviation, avait d’ailleurs réussi un atterrissage à cet endroit. Toutefois le projet achoppe et, le 15 août 1952, le tout est revendu à Ligori Imbeault.
Avec la décennie 1960 et la construction de l’aéroport de Saint-Irénée (inauguré en juillet 1962), le lac Nairne est de plus en plus délaissé par les aviateurs où se retrouvent toutefois des hydravions de pêcheurs se rendant dans leur camp de pêche dans l’arrière-pays. Le bâtiment du garage de l’aviation devient l’Hôtel aviation, un lieu récréatif fréquenté par la jeunesse charlevoisienne et dont la réputation à la fin des années 1970 était plutôt mauvaise. Le bâtiment brûle vers 1980. Depuis ce temps, la présence d’hydravions est pour le moins épisodique si ce n’est les Canadairs qui viennent s’y charger en eau lors des feux de forêt.